Publié le : 09/08/2016 par Hélène WEYDERT

Harcèlement: lequel?

Pendant plus d’une année et jusqu’à son licenciement, un salarié s’est vu astreint à des tâches « dégradantes », sans aucune importance, et habituellement confiées à des stagiaires estivants: il estime avoir subi un harcèlement moral et/ou obsessionnel, ayant conduit à sa dépression, son absence pour maladie, et pour finir son licenciement.

L’employeur conteste et soutient que ce salarié a été licencié suite à une période de maladie prolongée ayant perturbé le service. 

 

La question qui se pose en premier lieu est de savoir pourquoi le salarié a invoqué devant les premiers juges un harcèlement moral, puis, devant les juges de la Cour d’appel, un harcèlement obsessionnel.

Harcèlement: lequel? Et pourquoi?

Harcèlement sexuel, obsessionnel, moral, discriminatoire ou même combiné ? Lequel « choisir »? Et pourquoi?

Tous ces cas de harcèlement ont pour point commun des agissements fautifs, répétés et délibérés, pouvant objectivement être qualifiés de harcèlement. 

L’enjeu, c’est la preuve.

En effet, tandis que les victimes de harcèlement moral doivent prouver les agissements fautifs, les victimes de harcèlement sexuel ou discriminatoire bénéficient, quant à elles, grâce à l’Union européenne, d’un allègement de la charge de la preuve.

Attendu que si le législateur fait bénéficier les victimes de harcèlement sexuel ou discriminatoire d’un allègement de la charge de la preuve, un tel allègement n’est pas prévu pour les victimes de harcèlement moral (Cour de Cassation, Luxembourg, 5 mars 2015) 

Le harcèlement obsessionnel, c’est quoi?

Quiconque aura harcelé de façon répétée une personne alors qu’il savait ou aurait dû savoir qu’il affecterait gravement par ce comportement la tranquillité de la personne visée, sera puni d’une peine d’emprisonnement de quinze jours à deux ans et d’une amende de 251 à 3.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement. Le délit prévu par le présent article ne pourra être poursuivi que sur plainte de la victime, de son représentant légal ou de ses ayants droit. (Article 442-2 du Code pénal)

 

En l’occurrence, les juges de la Cour d’appel relèvent essentiellement deux points:

1. La dépression du salarié, ayant entraîné son incapacité de travail prolongée, est due à des circonstances privées (maladie, décès, divorce), confirmées par témoins (notamment le médecin ASTF, sans aborder ici le secret professionnel médical). 

2. Le salarié a été licencié suite à une période de maladie prolongée ayant perturbé le service : il était en effet absent 40% de son temps sur les 3 dernières années, soit au moins deux années avant l’attribution des tâches « dégradantes » invoquées par lui. Il semblerait donc que ses nouvelles attributions aient été la conséquence de son incapacité de travail, et non sa cause. 

Enfin, la Cour d’appel relève que le salarié a soutenu devant les premiers juges du tribunal du travail, être victime de harcèlement moral puis, débouté et ayant la charge de la preuve, a demandé en appel qu’il soit opéré un renversement de la charge de la preuve sur base du harcèlement obsessionnel. La Cour d’appel a refusé et a déclaré le licenciement justifié.

 

Cour d’appel, 14 juillet 2016

 



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